Dernière modification le 24 mars 2024 à 07:54.
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Qu’est-ce qu’on entend par « neutralité » lors d’une sélection de technologies ? Est-il possible de réaliser une sélection de technologies en toute neutralité ? Si oui, comment y arriver ?
Dans cet article, nous explorons le sujet.
Lors d’un sondage personnel et non-scientifique réalisé récemment sur la plateforme LinkedIn, 89 % des gens sondés ont jugé qu’il était important ou très important d’avoir de la neutralité lors de la sélection de technologies numériques dans une PME.
Avant d’énumérer les caractéristiques d’une sélection de technologies neutre, il est important de définir la neutralité.
Aussi, rappelons-nous que la sélection de technologies est le processus par lequel la PME va choisir les solutions et fournisseurs qui l’accompagneront pour implanter les technologies numériques nécessaires à sa transformation.
Qu’est-ce que la neutralité ?
La neutralité se définit par le fait que l’exercice de sélection de technologies ne favorise aucune partie en particulier et qu’elle est réalisée sans biais. On parle donc forcément d’impartialité et d’objectivité dans le processus.
Il est important de préciser que la neutralité s’applique tant aux départements et représentants de l’organisation qu’aux fournisseurs invités à répondre à la demande de propositions et aux technologies considérées.
En langage courant, l’objectivité est la « qualité de ce qui est conforme à la réalité, d’un jugement qui décrit les faits avec exactitude »1.
Elle peut caractériser, un objet en tant qu’objet, la connaissance ou la représentation d’un objet et enfin le sujet de cette connaissance ou représentation. L’objectivité est la description d’un objet vers laquelle tend une personne cherchant à faire abstraction de ses propres jugements de valeur.
Source : Wikipedia
La neutralité implique que les solutions (technologies et fournisseurs) soient évaluées sans biais personnel, pression externe et intérêt direct.
Dans la suite de cet article, nous allons exposer les trois types de neutralité : interne, externe et technologique.
Neutralité interne : Représenter les intérêts de la PME en entier
La neutralité interne fait référence au fait qu’il n’y a pas de parti pris pour un département, un individu ou un groupe donné dans la PME.
Conseil no 1 : Formez un comité de sélection représentatif
Un élément crucial dans le processus de sélection est que le comité de sélection soit représentatif de l’ensemble de la PME.
Ainsi, il est donc important que chaque département, chaque unité géographique soit représentée dans ce comité.
Chaque unité de la PME aura donc son mot à dire dans le processus de sélection et pourra influencer le processus.
Conseil no 2 : Définissez une grille d’évaluation détaillée avec des critères essentiels et un système de pointage
Dans la mesure du possible, assurez-vous de préparer une grille d’évaluation basée sur des critères identifiés par le comité de sélection.
Chaque critère aura un système de pointage.
Certains critères seront des éléments jugés essentiels ou critiques.
Vous utiliserez cette grille pour comparer les propositions reçues.
Conseil no 3 : Le plus possible, assurez-vous qu’il y ait un consensus dans le comité
De façon similaire aux jurys dans les procès criminels, il est fort important d’obtenir un consensus quant aux décisions qui seront prises par le comité, tout au long du processus.
Il est normal que des discussions animées aient parfois lieu et que les esprits s’échauffent à l’occasion.
Dans la mesure du possible, le comité doit donc arriver à un consensus.
Conseil no 4 : Offrez au comité un accompagnement neutre et indépendant
Il est fort utile que le comité soit accompagné par une personne indépendante, n’ayant pas droit de vote dans le comité.
La personne interviendra et jouera en quelque sorte le rôle de médiateur pour aider le comité à prendre des décisions éclairées.
Il est normal que les esprits s’échauffent parfois. La présence d’une personne indépendante va aider à refroidir les esprits !
Neutralité externe : Mettre à égalité les fournisseurs invités au processus
La neutralité externe consiste à ne pas avoir de biais particulier pour quelque fournisseur invité à répondre à l’appel d’offres.
Conseil no 5 : Soyez transparents et précisez aux fournisseurs invités si un des fournisseurs a déjà une relation d’affaires avec vous
Il peut arriver qu’un de vos fournisseurs de technologies numériques ait dans son offre des services répondant à ce que vous recherchez.
Si vous l’invitez, assurez-vous de révéler cette information à tous les fournisseurs invités.
Si le fournisseur en question détient de l’information qui n’est pas connue des autres fournisseurs, cela pourrait l’avantager.
Assurez-vous donc que cette information soit également partagée à tous.
Conseil no 6 : Évitez les conflits d’intérêts chez les fournisseurs
Différents conflits d’intérêts pourraient survenir.
Par exemple, si vous engagez des consultants pour vous accompagner dans le processus de sélection des technologies et que ceux-ci voudraient déposer une offre pour l’implantation, ils sont clairement en conflits d’intérêts.
Vous pourriez vous dire : « Ah, je vais séparer le processus de sélection en deux mandats : la rédaction du cahier de charges et ensuite la gestion de l’appel d’offres. Puis je pourrais confier la rédaction du cahier de charges à celui qui veut aussi déposer une offre de services pour l’implantation. »
C’est une situation à éviter à tout prix.
En effet, ces consultants auront un parti pris et pourraient – volontairement ou involontairement ! – orienter la rédaction du cahier de charges pour favoriser leur proposition plus tard dans le processus.
Conseil no 7 : Assurez-vous que les fournisseurs ont des moyens comparables
Il est fort possible que les fournisseurs invités n’aient pas des moyens comparables.
Par exemple, si vous invitez des entreprises privées et des OBNL, elles n’ont pas les mêmes moyens.
L’entreprise privée a une certaine obligation de rendement financier, ce que l’OBNL n’a pas.
Les OBNL ont aussi souvent des subventions de fonctionnement.
Cette situation fait en sorte que la structure de coûts des deux ne se compare pas.
Cela réduit donc la neutralité.
Conseil no 8 : Traitez les fournisseurs également et équitablement
Ne donnez pas de traitement de faveur à un des fournisseurs.
Si un des fournisseur vous demande un traitement particulier, vous devez également l’offrir (et potentiellement le donner) aux autres.
Aussi, si vous devez répondre à des questions de certains fournisseurs, assurez-vous de fournir les réponses à tous les fournisseurs invités.
Conseil no 9 : Ne parlez pas aux fournisseurs !
Cela peut paraître un peu fort, n’est-ce pas ?
Toute discussion ou échange verbal avec les fournisseurs peut affecter la neutralité car on pourrait fournir de l’information à un des fournisseurs au détriment des autres également invités à répondre à l’appel d’offres.
Pour les questions, on procèdera idéalement par écrit.
Chaque fournisseur pourra envoyer une liste de questions.
On les regroupe donc et on rédige les réponses et clarifications, qu’on envoie à tous.
Neutralité technologique : Considérer toutes les options possibles
La neutralité technologique consiste à ne pas avoir de préférence particulière pour une technologie ou une architecture en particulier.
Le cas échéant, ces préférences peuvent faire partie des critères de sélection ou d’évaluation.
Conseil no 10 : Ne pas partir avec un biais technologique
Qu’est-ce qu’un biais technologique ? C’est de partir avec une préférence pour une famille de technologies en particulier.
Vous voulez un exemple assez répandu ? Les technologies Microsoft. 🤓
Si vous partez avec ce type de biais, cela va forcément restreindre votre choix.
Nous vous recommandons plutôt d’élargir vos options tout en accordant un certain nombre de points au type de technologie dans votre grille d’évaluation.
Conclusion : Respecter la neutralité… le plus possible !
Est-ce que vous vous dites que la neutralité, c’est un voeu pieux ?
Sans doute…
Comme vous avez pu le constater, atteindre une neutralité totale vient avec un lot d’efforts que la majorité ne peut malheureusement pas se permettre.
La grande entreprise a davantage de moyens pour se permettre des processus d’approvisionnement plus neutres.
Dans la PME, il faut faire des choix et respecter la neutralité dans la mesure du possible.
À vous de choisir votre niveau optimal de neutralité.
De notre côté, voici nos recommandations :
- Formez un comité de sélection représentatif et de vous assurer qu’il soit collaboratif et ouvert.
- Au besoin, engagez un consultant indépendant pour accompagner et éclairer votre comité dans ses choix.
- Évitez tout conflit d’intérêts avec les fournisseurs. Le contraire est une recette assurée pour maximiser les résultats d’un des fournisseurs et non pas les vôtres !
- Faites preuve de transparence avec les fournisseurs et évitez de cacher de l’information à certains.
- Soyez respectueux des fournisseurs et communiquez clairement votre façon d’évaluer et comparer les propositions reçues.
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Références
Si vous avez aimé votre lecture sur le sujet, je vous recommande de consulter les articles suivants, qui m’ont été fort utiles dans la phase de recherche sur le sujet :
- La neutralité informatique, un texte d’opinion sur Le Devoir.
- Is Technology Neutral ?, par Sam Brinson.
- Rethinking technology neutrality, un texte de recherche de Brad A. Greenberg.
- Technology-Neutral Versus Technology-Specific Procurement, sur The Economic Journal.
- The Myth of Neutrality, sur Center for Humane Technology.
- Technological Neutrality and Free Software, par GNU.